Hier soir, Bichette ne voulait pas être seule dans sa chambre. Elle a peur du noir. Peur que cette obscurité l’avale, peur de se laisser aller dans les bras de Morphée, et surtout peur que des gens malveillants (des « assassins ») viennent lui faire du mal alors que ses sens sont diminués par le noir.
Petits enfants ou plus grands, la peur du noir est très courante. C’est une problématique qui est partagée par de nombreux parents que j’accompagne en coaching parental. La peur du noir revêt des habits de monstres ou de loup, puis prend l’image de voleurs, terroristes ou assassins, à mesure que l’enfant grandit. D’après Freud, cette peur du noir, appelée achluophobie, est une manifestation de l’anxiété de séparation. Tous petits, les enfants ont du mal à se séparer physiquement et émotionnellement de leur figure d’attachement même pour quelques heures, et plus tard, c’est la peur d’une séparation définitive qui terrorise nos enfants : l’angoisse de la mort.
Si votre enfant a peur du noir, que les séparations sont difficiles, et que vous souhaitez échanger avec moi sur ce sujet, n’hésitez pas à prendre un RDV pour une séance de découverte en coaching parental. D’une durée de 30 min en visio, elle est offerte et sans engagement :
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Alors, comment rassurer sans mentir (parce que oui, la violence gratuite existe !) ou lui promettre l’impossible (« mais non, je ne vais jamais mourrir »). De manière générale, comment accompagner nos enfants, non pas à ignorer cette peur, mais à trouver en eux, la force intérieure nécessaire pour la surmonter ?
Voici le sommaire de l’article que je vous propose à ce sujet :
- Pourquoi se manifeste la peur du noir et que cache t’elle ?
- Les différentes peurs à diverses tranches d’âge
- Pourquoi la peur est une émotion utile
- 5 erreurs à ne pas faire lorsque son enfant a peur du noir
- 10 conseils pour apaiser la peur du noir chez les enfants
Pourquoi se manifeste la peur du noir et que cache t’elle ?
Privation de sens
Une fois la nuit tombée, l’obscurité fait place à un sentiment d’insécurité. La perte de son sens visuel déstabilise l’enfant et ne lui permet plus d’avoir la sensation de « contrôler » son environnement. Si les pensées angoissantes et parasites viennent l’envahir (« et si quelqu’un ou un monstre ou un loup était caché dans mon placard ? »), c’est la fin des cocotiers ! Car sans voir, l’enfant peine à se rassurer tout seul. Les objets peuvent se déformer avec l’obscurité, certaines formes peuvent apparaitre aussi.
Lorsque l’ouïe s’en mêle, et que la maison est plongée dans le silence, que les bruits de vie, familiers et rassurants sont absents, qu’on entend les bruits de la maison comme des craquements, l’enfant se sent démuni et perdu. D’une simple pensée fugace nait une grande angoisse.
La solitude
Et puis, le noir, la nuit, c’est vivre la solitude. L’enfant se retrouve avec lui-même, sans ses parents protecteurs et se laisse envahir par ses pensées. Si elles sont angoissantes, il peut avoir du mal à s’apaiser pour s’endormir et laisser le sommeil venir. Cette perte de contrôle et ce lâcher-prise peuvent également être difficiles pour certains enfants, surtout ceux qui redoutent les cauchemars.
Il est vrai aussi, qu’ on lui demande de rester allongé, calme, et d’oublier temporairement ses envies, ses jeux, ses projets. L’enfant isolé, qui n’a pas sommeil, se demande ce que font les autres. Il repense à tout ce qu’il voudrait raconter à ses parents, aux jeux auxquels il voudrait jouer. Si le sommeil ne vient pas rapidement, il doit aussi gérer l’ennui… Parfois, la peur du noir s’ajoute aux excuses classiques pour retarder le moment de l’endormissement. « J’ai envie d’aller faire pipi », « j’ai soif », « j’ai une question » sont des excuses très utilisées par les enfants pour rallonger de quelques instants les moments d’échange avec les parents.
Les différentes peurs à diverses tranches d’âge
A chaque tranche d’âge, on retrouve différentes peurs chez l’enfant :
De 0 à 2 ans
Les tous petits, jusqu’à environ deux ans, découvrent leurs sens de manière accélérée. Ils peuvent s’effrayer de bruits forts dans la maison, des visages étrangers, des changements inexpliqués dans leurs routines quotidiennes. Tout ce qui est inconnu, excessif ou brutal peut générer des peurs chez un bébé. Un tout-petit réalise à partir de 9 mois environ qu’il ne forme pas un « tout » avec sa maman. Qu’elle peut donc le quitter, pour un instant, pour une nuit entière, ou pour toujours ! Cette prise de conscience génère très souvent de véritables angoisses chez le bébé, c’est la fameuse angoisse de séparation (« crise des 9 mois »). Pour en savoir plus, allez lire mon article sur la théorie de l’attachement qui abore ce sujet de manière plus détaillée.
De 2 à 4 ans
Les enfants, en grandissant, peuvent également ressentir de l’anxiété face aux animaux, à l’imaginaire, aux nouvelles découvertes (piscine, sable, le Père Noël !). Et puis, l’acquisition de la propreté est également une étape fondamentale de lâcher-prise et de découverte. Réaliser et voir ce que son propre corps produit qui peut être anxiogène. Ils commencent également, à cet âge-là, à faire le lien entre leur comportements, leurs émotions, et les réactions de leur entourage, notamment de leurs parents. La peur de commettre une erreur débute à cet âge-là. Et c’est le début de la peur du noir également.
De 4 à 6 ans
Leur terrain potentiel d’angoisse s’étend au-delà de leur environnement proche, et à mesure de leurs découvertes, ils peuvent développer la phobie des insectes, des dentistes, de l’orage, etc. Ils ont parfois du mal à faire une différence entre le réel et l’imaginaire et peuvent se laisser très facilement impressionner par des médias (films, livres). Ou même par leurs propres rêves, qui leur paraissent parfois réels. Et puis, c’est également le début de l’anxiété sociale, car l’enfant interagit de plus en plus avec ses pairs.
De 7 à 12 ans
L’anxiété sociale prend des proportions très importantes dans la tranche d’âge des 7 à 12 ans : peur de l’école et des contrôles, du jugement des autres, de l’échec. La peur du noir exprime plutôt à cet âge-là une peur de la mort et de la séparation définitive (d’abord la leur, puis celle de leurs proches).
Au delà de 12 ans
Ce sont des angoisses liées à leur quête de sens de la vie : quelle est ma place ? pourquoi je suis né ? Qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? L’adolescence est une période de recherche d’identité au-delà du cercle familial, et l’ado peut être très affecté par les jugements de ses pairs, les changement de son corps et du regard des autres.
Pourquoi la peur est une émotion utile
Comme toutes les émotions, la peur a une utilité propre. Elle nous envoit des signaux déterminants pour réveiller notre instinct de survie et nous protèger des dangers. Il ne s’agit donc pas de l’ignorer ou de l’étouffer. Toute la nuance consiste à séparer les peurs rationnelles, des peurs irrationnelles.
Les peurs, comme toutes les émotions négatives, génèrent une action forte, rapide et centrée sur soi. Celles sur lesquelles on peut agir sont utiles, elles sont indispendables même. Par contre, les peurs sur lesquelles nous n’avons aucun pouvoir d’action ne sont finalement que des inquiétudes, souvent liées à des projections futures. Revenir dans la situation présente, et définir si nous pouvons ou non contrôler or agir sur la situation permet de relativiser les peurs ressenties et les requalifier.
5 erreurs à éviter lorsque son enfant a peur du noir
- Ne pas ridiculiser, minimiser, se moquer « mais voyons, ça n’existe pas les monstres » « tu as passé l’âge d’avoir peur des loups »
- Eviter de faire des promesses irréalistes que l’on ne pourra pas tenir (et lorsqu’ils ont passé l’âge de croire à la magie, n’utilisez pas les solutions magiques, telle que « ton doudou te protège »…) Les plus grands pourraient se sentir mal compris et infantilisés.
- Autant que possible, il n’est pas conseillé de l’accueillir dans votre lit pour toute la nuit et lui laisser penser, par cette même occasion, que seuls les parents peuvent gérer sa peur et le « protéger ». Car l’accompagner, c’est avant tout l’aider à trouver les ressources au fond de lui-même pour surmonter sa peur du noir.
- Ne pas faire culpabiliser en laissant son enfant penser que ressentir de la peur n’est pas autorisé (« tu n’es plus un bébé », « les hommes doivent être forts, et n’ont pas peur des loups »).
- Limiter les expositions à des « déclencheurs » (films, histoires sordides, etc). Il faut parfois adapter les médias à chacun des enfants dans la fratrie. Chez nous, Canaille n’a pas peur des monstres, des films de super-héros, des films d’action. Mais par contre, Bichette, pourtant de 3 ans son aînée, est très sensible aux stimulis. Elle réagit très fort à toutes les émotions transmises dans les films. Donc, on se régale (toutes les deux !) avec des comédies romantiques, qui nous transmettent joie et amour… et on évite les films avec trop de suspens ! Bref, il faut adapter les soirées ciné en fonction de chacun des enfants.
10 conseils pour apaiser la peur du noir chez les enfants
- Encourager à verbaliser sa peur, ou bien la dessiner. « Qu’est-ce qui te fait peur exactement ? », « raconte-moi donc ce cauchemar », « et si on dessinait ce gros monstre ensemble pour voir à quoi il ressemble ? »
- Ecouter attentivement et prendre en considération sa peur : lui parler de vos propres peurs d’enfant en évoquant une des inquiétudes que vous aviez à son âge (mais que lui, ne partage pas !). Par exemple, s’il a peur des araignés, et vous des vers de terre, parlez-en avec lui. Il se sentira plus fort.
- Satisfaire, de manière adaptée, leur besoin d’information (sur les guerres, la violence gratuite, les virus, etc). Parfois, l’imagination des enfants est pire que la réalité et l’information peut permettre de relativiser.
- Lui rappeler que la peur est une émotion utile. Mais, que son utilité se limite aux situations sur lesquelles on peut agir. Sinon, cette émotion est de l’inquiétude, liée à des projections qu’on se fait du futur. Et l’inquiétude elle, ne sert à rien.
- Demander à votre enfant de proposer lui-même des solutions qui lui permettent d’affronter sa peur.
- Utiliser une veilleuse, laisser la lumière du couloir allumée : pénombre et obscurité sont très différentes.
- Se souvenir ensemble des fois ou il a réussi à affronter une peur dans le passé.
- Libérer son énergie : respirations profondes, chanter, rire, crier. Et puis après, vous pouvez utiliser des objets de retour au calme, comme une boule à neige par exemple. Pour savoir comment fabriquer une bouche à neige personnalisée, lisez mon article en cliquant ici.
- Mettre en place un rituel du coucher avec un temps dédié pour préparer la séparation. Pour lire mon article sur les rituels du soir, cliquez ici.
- Inventer des rituels magiques (pour les plus petits uniquement) : super-héros, barrière formule magique, doudou protecteur, spray magique.
Et vous, quelles sont vos astuces pour aider votre enfant à combattre sa peur du noir ? N’hésitez pas à laisser un commentaire ci-dessous avec vos idées ! Si vous avez aimé cet article, abonnez-vous à ma newsletter pour recevoir une alerte lors de la parution de mon prochain article.
Livres conseillés :
« J’élève mon enfant », Laurence Pernoud, éditions Horay, 2016 et « Au coeur des émotions de l’enfant », Isabelle Filliozat, éditions JC Lattès, 2014
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